Le crédit aux particuliers sur une mauvaise pente
Les statistiques de l’ASF, l’Association française des sociétés financières, écrivent à leur façon l’histoire de la chute du crédit aux particuliers, mouvement inexorable enclenché depuis les sommets atteints en 2008.
La bonne santé du crédit est contingente du climat économique général. Or, les chiffres Insee sur la conjoncture 2012 concluent sur une croissance économique nulle, contre un PIB encore positif de 1,7% en 2011, et il n’y aura pas de consolation dans les perspectives de 2013. Le déficit public est ressorti en 2012 à 4,8% du PIB et la dette publique a franchi, sans trompette, les 90% du PIB ce qui augure une vague de taxes ou de suppressions d’avantages, soit, une érosion plus ou moins forte du budget disponible des ménages. Dans ce marasme, la production de crédits immobiliers et de crédits à la consommation accuse le coup.
Pour l’emprunt immobilier et le financement de l’amélioration de l’habitat, les réalisations 2012 s’élèvent à 11 Md€ contre 14,5 Md€ en 2011, un effondrement de plus de 24%. Côté crédits à la consommation, la production a été chiffrée à 35,8 Md€ en 2012, confirmant un recul de 5% comparativement aux résultats 2011.
Le crédit immobilier freiné par le prix de l’immobilier
Le nouveau décrochage du crédit immobilier accompagne la baisse du nombre d’acquéreurs. Tandis qu’ils étaient 858 000 en 2011, les acquéreurs n’étaient plus que 650 000 en 2012.
Pourtant, 2012 a plutôt été marquée par une baisse des prix de l’immobilier en général, même dans les villes importantes, et des conditions d’emprunts très favorables, les taux s’échelonnant de 3% à 4% selon la durée d’emprunt et les conditions d’octroi n’ayant pas été excessivement durcies.
Or, ces avantages sont aussi des facteurs d’attente : si les prix baissent, attendons voir s’ils ne vont pas baisser encore et espérer de meilleures affaires. A l’inverse, si les prix de l’immobilier grimpent, dépêchons-nous d’acheter avant que cela ne soit hors de portée. Toutefois, ce raisonnement a des limites car, les prix immobiliers, dont le rythme de hausse ralentit, restent très élevés et pour la plupart inaccessibles aux ménages dont le revenu moyen est très proche du SMIC. Selon la Banque de France, considérant les données conjoncturelles propices à une contraction de la demande, les établissements de crédits augurent moins de 600 000 acquéreurs en 2013.
Le crédit à la consommation victime du bas de laine
La production de crédits à la consommation est d’abord entrainée par le marché de l’automobile. Or, sur l’année 2012, les immatriculations ont perdu 14%, l’absence de prime à la casse montrant la réalité cruelle du faible niveau de la demande. Le crédit automobile, avec un résultat de 6,5 Md€ en 2012, a donc chuté de 5,5% par rapport à 2011. Comme 2013 n’indique aucun renouveau du parc automobile, il faut s’attendre à un nouvel affaissement du crédit automobile.
Les prêts personnels ont produit une recette de 10,7 Md€ en 2012, soit une chute de 6,5% par rapport à 2011 et les crédits renouvelables ont réalisé en 2012 11,8 Md€, glissant à leur tour de 6% par rapport à 2011 (12,6 Md€). Il faut reconnaître les effets de la loi Lagarde renforcée par Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire, qui vise à restreindre le surendettement des ménages et lutter contre les taux d’usure, ce qui n’est absolument pas critiquable. Par ailleurs, les succès claironnés dans les domaines de l’épargne témoignent de ce que les ménages ne sont plus d’humeur à consommer.
Avec un taux de chômage supérieur à 10%, la confiance des ménages, ou plutôt leur frivolité, est forcément en chute de libre, l’heure n’étant pas aux dépenses et aux projets inconsidérés. Dans ce contexte, rien ne justifie que l’exercice 2013 soit meilleur en matière de crédit aux particuliers.
Un retour en force du crédit supposerait dans un premier temps l’amélioration des revenus et dans un deuxième temps, l’assurance pour les ménages français de la pérennité de ces meilleurs revenus, soit l’avènement d’un temps idyllique. A moins que le marché du crédit, dans un scénario de science-fiction, se détache de ses présupposés initiaux et se trouve une autre conception, une nouvelle raison d’être, le crédit aux particuliers n’est pas prêt de redécoller dans ses conditions actuelles. Il faudrait que le crédit passe d’outil utile, auquel on recourt pour pallier à un besoin ponctuel, à l’outil indispensable, ce qui avait été fait à travers le crédit revolving avec les conséquences que l’on sait… dramatiques pour les emprunteurs. Et si on faisait autre chose que du crédit ?